L’avis tardif de l’employeur de la garde à vue de son salarié est-il une cause de nullité?
La chambre criminelle de la Cour de cassation a répondu récemment à cette question (Crim.26 juin 2024, n°23-84.154).
Les dispositions de l’article 63-2 du code de procédure pénale prévoient que le gardé à vue a le droit de faire prévenir de cette mesure une des personnes suivantes:
- une personne avec laquelle elle vit habituellement,
- ou l'un de ses parents en ligne directe,
- ou l'un de ses frères et sœurs,
- ou toute autre personne qu'elle désigne de la mesure dont elle est l'objet.
Elle peut en outre faire prévenir son employeur. Lorsque la personne gardée à vue est de nationalité étrangère, elle peut faire contacter les autorités consulaires de son pays.
Dans l’affaire qui était jugée, le gardé à vue avait demandé que son employeur soit avisé de la mesure dont il faisait l’objet certainement afin qu’il soit informé de son impossibilité matérielle et insurmontable de se rendre à son lieu de travail.
L’employeur avait été informé quatorze heures plus tard. L’avocat a alors soulevé l’irrégularité de la procédure du fait de cette information tardive.
La Haute Cour a répondu que si le méconnaissance de cette formalité constituait bien une cause de nullité, ce n’est qu’à la condition que l’intéressé démontre que cela lui a causé grief.
Or de manière surprenante, elle considère que ce grief ne peut que concerner l'exercice du droit à l’assistance de l’avocat.
C’est dire que l’intérêt même de cette formalité semble détourné à notre sens puisqu’il importe peu que le grief soit que l’information ne soit pas parvenue en temps utile à l’employeur.
On peine également à comprendre dans quel cas l’information tardive de l’employeur ou son absence d’information pourrait avoir pour conséquence d’empêcher ou de gêner l’exercice du droit à l’assistance d’un avocat.
L’unique hypothèse nous semble celle où l’employeur aurait suggéré l’intervention d’un avocat auprès de son salarié. Son information tardive voire son absence d’information pourrait alors effectivement avoir des conséquences sur l’exercice du droit à l’assistance d’un avocat. Celle-ci ne serait pas en mesure d’intervenir rapidement auprès de l’intéressé.
Cette hypothèse est en effet prévue par les dispositions du code de procédure pénale.
Il résulte en effet de l'alinéa 2 de l'article 63-3-1 que l'avocat peut également être désigné par la personne prévenue en application du premier alinéa du I de l'article 63-2. Cette désignation doit toutefois être confirmée par la personne gardée à vue.
Cette solution nous semble toutefois critiquable dès lors qu'elle semble ajouter une condition qui n’existe pas dans la loi. Celle-ci prévoit uniquement que celui qui invoque une nullité rapporte la démonstration d’un grief, quel qu’il soit, sans que la loi n’exige un grief particulier.
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Illustration générée avec IA.
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